SOUS LE CIEL BLEU AREVA LAVE PLUS NOIR

Publié le 30 juillet 2008

A quelques jours de l'ouverture des Jeux à Pékin, la com sur la qualité de l'air est à la hauteur du discours officiel chinois traditionnel. Dans « Libération », Pascale Nivelle nous indique qu' « à Pékin l'indice de pollution de l'air s'échelonne de 1 à 500. A 100 le ciel est déclaré « bleu » quelle que soit la couleur. » M. Du Shaozong le responsable du bureau de protection de l'environnement à Pékin, visiblement rompu à la langue de crise ou com de bois expliquait : « le temps semble brumeux, mais cela n'a pas forcément de lien avec la pollution ; c'est comme dans une salle de bains, il y a beaucoup de vapeur, on ne peut pas voir les gens, mais ce n'est pas pour cela que l'air est pollué. » L'agence Chine Nouvelle parlait hier de « journée assez bonne et de ciel bleu. » La visibilité ne dépassait pas 100mètres selon le journal L'Equipe...

LE BAROMETRE DE Mr. DU SHAOZONG et de Mme ANNE LAUVERGEON

Pendant ce temps, plus près de chez nous, on ne compte plus les faux vrais incidents ou les vraies fausses alertes sur les sites du parc nucléaire français. Contaminations à la centrale de Saint Alban , fuites à celle de Romans... Le pompon à celle de Tricastin pour laquelle on ne comptera bientôt plus.

LES SALADES D'AREVA

Entre info, contre info, la com de crise, l'argumentaire média-compatible, l'objectif d' Areva et d'Anne Lauvergeon reste : minimiser les affaires en « assumant » Dans le Vaucluse elle déclarait récemment « Aucun de ces incidents n'a eu d'impact sur la santé des personnels et des riverains, ni sur leur environnement ; de légères traces de contamination sans conséquence sur la santé». En gros, ça fait de la vapeur et par ailleurs ce n'est pas pollué...La présidente du directoire d'Areva s'est excusée pour l'émotion suscitée et promis des indemnisations aux agriculteurs et maraîchers autour de l'usine Socatri...

L'interdiction d'utiliser l'eau avait certainement été fatale à quelques malheureuses salades.

C'est finalement 360 kilos d'uranium- quand même- qui ont été rejetés dans deux cours d'eau, les rivières de la Gaffière et du Lauzon... L' « incident » s'est produit le 7 juillet vers 23 heures, mais n'avait été signalé que vers 7h30 le lendemain.
Les communes concernées n'avaient quant à elles été prévenues que le lendemain, en milieu de journée. Les déchets découverts proviennent d'activités d'enrichissement d'uranium à des fins militaires et ont été enfouis de 1964 à 1976 sous une butte de terre située au nord-est du site de Tricastin. La Socatri estime que la butte de terre sous laquelle ces déchets sont enfouis « ne constitue pas un risque sanitaire pour les populations ». La contamination de la nappe sous la butte a conduit, de 1980 à 1998, à son pompage à des fins de drainage. Le tertre est depuis sous surveillance...

Les maraîchers en question ont donc bien entendu que l'environnement n'était pas contaminé, l'eau le fut-elle qui passait par là à un moment. Et la nappe phréatique aurait des contours géologiques semblables à ceux, géographiques, des frontières de la France en 1986. Mieux vaut se déplacer sur le terrain de l'émotion et de la compassion face à ceux qui se placent pour combattre le nucléaire sur le terrain de la raison. Un mode toujours bien maîtrisé par le pouvoir. Aujourd'hui toujours mieux qu'hier.

Sous le ciel bleu de Provence les salades se veulent vertes.... Et le seront.

Jean-Louis Borloo, lui, ne peut noyer la salade quand il n'y a plus d'eau et reconnaît : «Il faut modifier le comportement des opérateurs et changer la culture des filiales qui travaillent de près ou de loin pour Areva et EDF. « J'ai le sentiment que plus on va vers les sous-traitants, plus la vigilance baisse»

Tiens... ? Les sous-traitants...

Pourtant la sous-traitance se généralise. Dans un dossier complet sur cette question dans l'industrie nucléaire, Annie Thebaud-Mony (chercheuse à l' Inserm- Institut national de la santé et de la recherche médicale- )explique : « S'appuyant sur le partenariat industriel déjà existant avec les constructeurs des centrales qui assurent, depuis le démarrage des centrales, la maintenance hautement spécialisée de ces dernières, la stratégie du parc nucléaire français, à partir de 1988, est de sous-traiter la quasi-totalité de l'exécution des travaux de maintenance en ne gardant, à l'interne que les tâches de préparation et de contrôle de ces travaux. Le volume de maintenance sous-traitée passe en 5 ans de 20 à 80%. »

Mais l'Autorité de Sureté Nucléaire estime "satisfaisant" dans son dernier rapport annuel le système d'évaluation de ces sous-traitants. Un point de stratégie de com semble urgent avec M. Borloo.

Les journalistes, eux, sont sur le mode de la « loi des séries » répondant aussi aux réflexes estivaux où il faut bien caser une info entre le sujet sur la réfection du Carlton à Cannes et la collecte des bigorneaux sur la plage de Piriac sur Mer. Loi des séries?

Dessin: Patrick LACAN

AREVA LAVE PLUS BLEU

Mais s'agit il d'une « loi des séries » voire d'une « série noire »... ?

Anne Lauvergeon annonce qu'Areva avait"connu sept incidents de niveau 1 en 2007 et tous les exploitants nucléaires français, 86".

Les chiffres :

En 2007, 928 incidents ont été recensés dont 842 de niveau 0 et 86

de niveau 1.

Le niveau 1 correspond à une "anomalie", du type des incidents survenus à Romans et au Tricastin (aucun incident de niveau 2 n'a été répertorié en 2007 (1 en 2006).

Areva lave notre ciel toujours plus bleu. Si série il y a, elle serait « durable.»

AREVA LAVE PLUS VERT (ou le « greenwashing (1) »)

Avec le réchauffement climatique et la nécessité de lutter contre les gaz à effet de serre, l'industrie nucléaire a trouvé un véritable argument publicitaire pour nous vendre ses centrales et faire de N.Sarkozy le VRP d'Areva sur la planète.

Oui, mais... Se poser en alternative au pétrole (fictive, mais ce n'est pas aujourd'hui le sujet) et vendre du nucléaire pour soutenir la production de pétrole, voilà qui ne pose aucun problème au lobby nucléaire. Il faut dire, nous le savons, que la com, chez Areva c'est béton.

Ceci, bien que sur la seule année dernière, le géant français du nucléaire a engrangé une progression de 55 % de ses commandes, soit près de 15 milliards d'euros, ou encore l'équivalent de cinq EPR ! « Citius, altius, fortius ! »

Alors ?

AREVA ENTRE EN PISTE. TOTAL SERT DE LIEVRE.

UNE CENTRALE NUCLEAIRE POUR PUISER DU PETROLE !

Les citoyens de la province d'Alberta (Canada) ont reçu en décembre 2006 un chèque de 500$; ce cadeau de Noël labellisé «chèque de prospérité» leur était adressé par le Ministre responsable en témoignage de l'éclatante santé des finances publiques. Les caisses sont pleines; l'Alberta en plein boom pétrolier, fait du Canada le 10^eproducteur de pétrole. La richesse en hydrocarbures n'est pas nouvelle, elle remonte à la découverte des gisements en 1947. Les ressources en pétrole, néanmoins, paraissaient vouées à un épuisement progressif. Or, en 2003,Oil and Gas Journal a officiellement classé le Canada au deuxième rang pour les réserves mondiales d'hydrocarbures derrière l'Arabie Saoudite en comptabilisant les immenses réserves de sables bitumineux connues depuis 1884, mais désormais jugées rentables.

Pour exploiter ces sables bitumeux les dégâts sont déjà considérables:

*l'exploitation à ciel ouvert a déjà entraîné la destruction de 500 km2 de forêt boréale

*le processus de production exige une énorme consommation d'eau; il faut de trois à cinq tonnes d'eau pour une tonne de pétrole lourd.

*les rejets d'eau sont énormément polluants.

*La pollution atmosphérique a considérablement augmenté où- par voie de conséquence- l'acidification des lacs atteint des niveaux inquiétants.

*La destruction des tourbières est très importante.

AREVA LAVE PLUS NOIR

*l'ampleur de la consommation d'énergie pose également un défi redoutable pour le milieu.

La production d'un million de barils de pétrole demande environ 24 millions de mètres cubes de gaz naturel. On sait que les projets pour 2015 visent à produire quatre à cinq millions de tonnes de barils par jour : la production locale de gaz n'y suffirait pas. Le président d'Energy Alberta Corporation vient de proposer l'utilisation de l'énergie nucléaire (nous y voilà !) pour produire l'électricité, la vapeur et l'hydrogène nécessaires à l'exploitation des sables bitumineux. Une centrale permettrait d'alimenter en électricité les entreprises pétrolières et depuis mars dernier Areva s'active auprès des autorités pour venir soutenir... Total qui a investi des milliards dans les sables bitumineux du Canada dès 2005.

Ces sables doivent être chauffés et nécessitent donc de très grosses quantités d'énergie ; c'est à ce niveau qu'intervient le nucléaire. D'ou cette idée de Total d'installer une centrale nucléaire à coté des champs pétroliers.

Anne Lauvergeon développe une stratégie qu'elle qualifie elle-même de stratégie « Nespresso ». Autrement dit, achetez moi la cafetière - elle veut dire un réacteur - et je vous vendrais les pastilles, elle parle du combustible. Compte tenu du prix auquel nous achetons les fameuses petites pastilles colorées au Niger, (mais c'est une autre histoire) et au Canada (tiens, tiens...), il n'y a pas d'inquiétude à avoir pour les comptes futurs de la maison Areva!

Et comme le groupe Total est entré au capital d'Aréva ont peut dire que pour le prix d'un baril on aura aussi droit a un second : un fût radioactif.

Dans les plaines de l'Alberta le ciel sera toujours plus bleu. Juste un peu de vapeur. Le Faucon pèlerin tundrius fortement menacé parmi d'autres espèces verra un peu plus, chaque jour, son espace reculer. Poussé vers un nord incertain.(2)